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Formidabili quegli anni & Lettera a mio figlio : Mario Capanna et l’espoir de 1968

Daniela Verdura-Rechenmann

Résumé

« (…) on ne peut pas oublier ’68. Les années 1960 ont été extraordinaires. Elles ont existé dans la tête, dans les jambes, pas seulement parce qu’on les raconte, mais parce que cela s’est vraiment passé », Toni Negri, Nous avons tous ’68 au corps.

La saison des luttes commence en Italie dès 1967 et se prolonge pendant six à dix ans (jusqu’en 1973 ou 1977, selon les interprétations), une durée exceptionnelle qui lui a valu l’appellation de « mai rampant ». Protagoniste de premier plan du « temps des révoltes », Mario Capanna a continué son combat politique au sein des institutions, locales et régionales d’abord, nationales et européennes ensuite. Capanna est aussi écrivain, auteur d’une quinzaine d’ouvrages. Deux nous intéressent plus particulièrement puisqu’ils reconstituent le ’68 italien : Formidabili quegli anni, publié en 1988, ni livre d’histoire ni pamphlet politique, mais « témoignage de choses vécues, et espérées, de l’intérieur » selon les propres mots de l’auteur, et Lettera a mio figlio sul Sessantotto (1998) qui veut « rétablir la vérité de ’68 à travers la vérité sur ‘68 » pour la génération de son fils adolescent.
Comment définir ’68, quelle a été sa portée en Italie et dans le monde, quelles sont ses conséquences ? Pour certains, ’68 a été en Italie le père de la violence et du terrorisme des années 1970, pour d’autres, dont l’auteur, le terrorisme de gauche est le fils de Piazza Fontana et de la strategia della tensione, il représente le “désaveu absolu” de ’68 et sert par contre le renforcement autoritaire de l’État. Contre les fossoyeurs de ’68, mais aussi contre les nostalgiques de sa résurrection, Capanna continue de prôner les vertus créatrices de la dissidence, fidèle au « contestez et créez » auquel le philosophe Ludovico Geymonat incitait ses jeunes disciples. Voglia di ’68 ? « 1968 fu un rasoio che separò il passato dal futuro [1] » , écrivait-il en citant le titre du Time dans sa préface à Formidabili quegli anni ; aujourd’hui, il est grand temps de revisiter l’histoire de ’68 de manière moins passionnelle.